Je suis devenu "Québécois" ce Noël 2021. J'ai reçu en cadeau une prétendue compilation sonore de 1938, l'année de ma naissance. Naïvement j'avais cru que le lien informatique me permettrait d'entendre la voix de Charles Trenet ou de Maurice Chevalier, mais en fait il n'y avait pas une seule chanson française, le lien débouchait simplement, et seulement, sur les grands succès du jazz de 1938
C'est sans doute l'effet Joséphine Baker sur la culture française cette année-là, sauf que l'on peut aimer le jazz sans faire passer Charles Trenet aux oubliettes !
Cela m'a fait réfléchir et j'ai compris que nous ne pouvons vivre sans l'anglais, et sans les réseaux de distribution anglo-saxons qui portent la culture. Sans eux plus de musique, plus de livres. D'ailleurs regardez les rayons de la Fnac et vous comprendrez. On peut le déplorer et je le déplore, mais il faut être réaliste et s'adapter au monde tel qu'il est, comme les Québécois qui ont appris à défendre leur identité.
Nous sommes désormais comme eux. Comme eux, nous sommes menacés dans notre identité par l'anglophonie mondialisée et wokisée. Sujet délicat qui exige beaucoup de discernement car il ne faut pas confondre l'usage de l'anglais et la menace culturelle qu'il entraine.
Dans ma jeunesse l'anglais était déjà une langue professionnelle, mais non indispensable, et l'on parlait encore breton ou alsacien dans les familles. Mais aujourd'hui, ayant atteint un certain âge, je constate que l'anglais est la langue de ma famille, disséminée entre Boston ( USA), Bollington ( GB), Strasbourg, Genève et Nice où je vis. Non seulement l'anglais est la langue obligatoire du travail de mes enfants, mais il est aussi le lien familial avec les familles des conjoints non francophones.
Que faire sans l'anglais ? Il faut entrer en résistance contre l'hégémonie de cette langue. Il faut le faire certes au nom de la culture et de l'identité française, mais aussi pour s'opposer à la dégénérescence du King's English, cette langue magnifique menacée par les marchands de soupe du monde entier.
Aux USA même, au nom de l'aide aux minorités, certains veulent imposer à l'école l'Ebony English, c'est à dire l'anglais pauvre et abâtardi des ghettos noirs. Chez nous on pourrait dans le même esprit vouloir remplacer à l'école, dans certains quartiers, le français, par le créole, celui d'Haïti ou de n'importe quel village d' Afrique francophone oar exemple.
Tout comme le français l'anglais est donc menacé par la wokisation; c'est à dire le refus de la modernité occidentale.
Il y a donc un problème, car si l'anglais est le grand diffuseur de la culture moderne informatique, il est aussi de plus en plus le vecteur d'une culture pourrie par Hollywood et la publicité, au service d'intérêts financiers et idéologiques hostiles non seulement à notre culture francophone, mais également à la culture occidentale en général.
Sous couvert de la modernité de l'anglais une sous culture américaine qui n'est pas celle des élites de Boston et du MIT, tend à s'imposer partout au service des intérêts commerciaux et de la politique de déconstruction de l'Occident.
Les pays anglo-saxons sont les premières victimes de la dérive libérale et financière qui produit cette sous culture de la pub et des médias. Mais par capillarité politique l'Union Européenne s'inscrit dans cette décadence culturelle occidentale qui abrutit les individus et détruit l'identité des peuples.
C'est donc bien l'esprit de résistance linguistique des Québécois qu'il nous faut imiter, mais cela ne suffit pas, car l'anglais n'est pas le problème, mais bien ce qu'il propage. Il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain et encourager auprès des élites anglophones la prise de conscience des enjeux culturels et identitaires.
Il s'agit mondialement de relever le défi du wokisme . Pour y répondre pas besoin de révolution, il suffit de ne pas réduire les choix décisionnels aux seuls critères de l'économie et du taux de croissance. Cela par exemple en refusant un énorme retour sur investissement minier au coeur de l'Amazonie, s'il doit être payé par la disparition d'une tribu amazonienne de 500 personnes, de sa langue et de sa culture. Eux aussi sont des Québécois.
Il est temps de comprendre que les acteurs de l'économie sont des êtres humains et non pas de simples statistiques en anglais de producteur/ consommateurs interchangeables. Il faut comprendre que le respect de la diversité implique des projets de sociétés qui peuvent ne pas être réduits à des algorithmes de profit. L'humanisme est une notion purement abstraite qui n'a de sens que si elle s'enracine dans les cultures particulières.
En ce qui concerne la mienne je ne veux pas qu'elle disparaisse et j'entre en résistance, comme les Québécois.
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