Nous sommes mi-octobre et il ne me reste plus guère qu'une dizaine de jours de marche avant d'atteindre le but.L'automne se fait sentir et les jours racourcissent. Je descends vers la cuvette de Ponferrada. La ville tient son nom du célèbre pont de fer construit pour les pèlerins. La légende reste mais la ville est défigurée par l'industrie. A part le château des Templiers elle ne m'intéresse pas et je la traverse rapidement. Après les derniers faubourgs je marche dans des vignes qui donnent l'excellent vin du Bierzo. Je respire un air doux et plein d'effluves de moût de raisin. J'atteins Cacabelos dans la douceur automnale et j'y fais étape.Le gîte circulaire est composé de mini chambres donnant sur une cour. J'y dors mal à cause de deux allemandes qui racontent leur vie à haute voix dans le box voisin. Le jour suivant au matin, j'atteins puis je traverse Villafranca del Bierzo et je m'enfonce dans les montagnes en remontant la vallée de la prison (Valcarcel), ainsi nommée en souvenir d'un seigneur brigand qui rançonnait les pèlerins.
Je marche seul désormais depuis la disparition d'Inge. Des compagnons rencontrés en France il n'y a plus que le très catholique couple Valissant que j'entraperçois parfois,mais qui marche en couple évidemment. En fait je n'ai plus envie de socialiser, la fatigue physique devient psychologique, j'ai hâte que cela se termine car le temps devient froid et humide et les gîtes ne sont pas chauffés. Pourtant il y a encore des hauts lieux à voir et je garde ma faculté d'émerveillement face aux beautés de la nature. Je suis aux portes de la Galice et me prépare à monter vers le Cebrero, mais pour l'heure je suis dans une vallée encaissée traversée très haut par un pont d'autoroute sur lequel les véhicules passent avec un bruit mat et étouffé.
Je remonte le Valcarcel sans y faire de mauvaises rencontres et je fais étape à Vega de Valcarcel dans un très grand gîte peu confortable. Les WC sont dans la cour et la nuit il me faut sortir dehors pour aller pisser en descendant , puis en remontant, un long escalier dans l'obscurité. Or à mon âge ( 65 ans en 2003) il me faut me lever la nuit souvent parfois......Excusez ce détail mais le pèlerinage c'est aussi cela, mais rassurez-vous ce n'est pas grave et ça se gère comme toute chose. Il suffit d'aimer la vie et d'avancer toujours ...Ultréïa !